et traînent les mouches

...et traînent les mouches

(dans AVENTURE Chasse & Pêche – 2001)

par : Yves Demers

La pêche à la mouche et la pêche à la traîne sont des grands classiques qui n’ont plus besoin de présentation. L’auteur vous propose toutefois de les fusionner dans une seule et même technique de pêche, en vous introduisant à l’art particulier de laisser traîner un streamer derrière votre embarcation…

De toutes les techniques de pêche qui existent, la pêche à la traîne n’est pas la plus vieille, mais pas la dernière-née non plus. En fait, il s’agit ici d’une méthode qui a depuis longtemps ses adeptes et à chaque année ses nouvelles recrues. Celui qui a appris par cette technique y reviendra ou l’utilisera toute sa vie et pour cause, ça fonctionne! Certains bouderont la pêche à la traîne à cause de la passivité de cette pratique et ils n’auront pas tort. De toutes les techniques, elle est celle qui, avec la pêche à l’appât fixe ou «à la ligne morte», demande le moins d’activité de la part du pêcheur. Cette passivité qui rebute certains en attire cependant d’autres pour qui la pêche ne signifie pas nécessairement d’être fatigués à la fin de la journée.

Pour ma part, je considère que la pêche à la traîne comme une excellente façon de savoir où se tient le poisson mordeur dans un plan d’eau et aussi une technique d’exploration d’un lac inconnu. Le fait de patrouiller un nouveau territoire m’apprendra où se situent les hauts-fonds, les bas-fonds, les pointes rocheuses, les charges et les décharges du lac et toutes autres structures utiles au pêcheur.

Aussi, je privilégie cette technique en début de saison surtout parce que les poissons ne sont pas nécessairement concentrés autour des structures mais plutôt à un certain niveau de profondeur où la température de l’eau leur convient. Il y a possibilité, à cette période, de prendre du poisson au beau milieu d’un lac, là où il n’existe aucune structure.

Les streamers que j’utilise en ce temps de l’année sont gros, très gros même. J’ai déjà capturé des poissons plus petits que mes mouches, c’est pour dire la voracité des poissons à cette période! Pour les sceptiques, tentez l’expérience d’attacher deux streamers à votre bas de ligne, un de taille conventionnelle à votre choix et l’autre un peu plus loin du même modèle mais de grosseur exagérée (selon vos normes) et vous verrez bien celui auquel les truites s’attaqueront le plus souvent.

Des façons de pratiquer la pêche à la traîne, il y en a pour tous les goûts. Les plus sophistiqués utiliseront les plus récentes techniques et matériaux en commençant par l’embarcation équipée de vivier, downrigger, moteur électrique à contrôle au pied, puissant hors-bord, sonar avec GPS intégré, etc. Ils opteront ensuite pour les cannes et moulinets dernier cri avec des leurres «high tech». Les autres y trouveront leur compte par la quiétude des soirs tranquilles à fouiller les baies de leur lac préféré à l’aide d’un canot et d’une simple canne à mouche ou d’un lancer léger. Ces deux types de pêcheurs très différents se rejoindront cependant sur deux points très importants, le plaisir de pratiquer la pêche et…d’obtenir du succès.

Les espèces

Par une très belle soirée d’été, mon streamer patrouillait les eaux froides d’un grand bassin situé entre deux immenses rapides. Les captures de cette soirée-là furent bien au-delà de toute espérance. Au menu, brochets, corégones, ouananiches, truites mouchetées et touladis. Évidemment l’histoire se passait il y a 25 ans dans un coin perdu du Labrador, ce qui n’a rien à voir avec les eaux de la plaine du St-Laurent des années 2000 par exemple. Cette histoire prouve cependant une chose: les espèces qui peuvent être pêchées à l’aide de cette méthode sont aussi nombreuses que les espèces présentes dans le plan d’eau exploré. La clé est de choisir l’espèce de poisson à laquelle vous voulez vous confronter, pour ensuite choisir les endroits où vous pécherez, les leurres à utiliser, les profondeurs à explorer, la vitesse de la traîne et le moment de la journée à privilégier. Aucune limitation quant à l’espèce avec la pêche à la traîne! Même qu’avec une mouche comme leurre, vous élargirez davantage l’éventail des possibilités. En effet, il vous sera alors permis d’utiliser des mouches très petites jusqu’à la grosseur d’un rat musqué ou d’un caneton. 

La pêche à la traîne est sans nul doute la meilleure technique pour capturer plusieurs espèces dans un même plan d’eau. Mais la grande force de la pêche à la traîne réside dans le fait que cette «patrouille» fera qu’inévitablement votre leurre sera, à un moment ou à un autre, présenté à une proie ou à un groupe de poissons mordeurs. Par la suite il vous sera facile d’investir plus de temps de pêche aux endroits où les poissons semblent plus nombreux ou mordeurs pour augmenter votre taux de succès.

Les mouches

Bien que la pêche à la traîne soit excellente avec des poissons-nageurs, des cuillères tournantes ou ondulantes, j’utilise des mouches comme leurres. Loin de moi la prétention de dire que c’est la meilleure méthode, mais c’est tout simplement celle que je préfère. Elle m’a rapporté beaucoup de succès année après année et j’éprouve beaucoup de plaisir à déjouer un poisson avec un équipement pour la pêche à la mouche. On dirait aussi que le combat est plus intéressant, plus vivant parce que le moulinet ne possède généralement pas de ratio de récupération plus élevé que 1/1 et que le leurre est suffisamment léger pour laisser au poisson toute la capacité de déployer ses énergies lors du combat. J’utilise de plus des streamers que je construis moi-même, ce qui ajoute au plaisir.

Construction

Ces mouches que l’on utilise pour ce genre de pêche, qu’ont-elles de particulières? Pas grand chose, mais tout de même quelques petites adaptations dans leur construction qui leur conférera une plus grande visibilité, stabilité et solidité. Autre détail, ces streamers seront à l’occasion pourvus de plus d’hameçons que ceux servant au lancer. Pourquoi ne parler que de streamer. Tout simplement parce que ce genre de mouche est monté originalement sur un ou deux hameçons à hampe longue et est donc plus visible à cause de sa dimension. À la pêche à la traîne, il est primordial que votre leurre soit de bonne dimension et très visible pour être repéré de loin par les poissons. Le plus souvent, on ne patrouille pas directement dans leur repaire mais plutôt à une certaine profondeur où il est plausible que les poissons soient en chasse.

Les modèles les plus couramment utilisés sont les streamers conventionnels à hameçon simple. La raison en est que la dimension de ces mouches se rapproche souvent de celle des proies naturelles des poissons recherchés. Autre fait peut-être encore plus important, est que ce sont les plus faciles à trouver sur le marché. Ils sont un bon choix en toute occasion mais spécialement pour la pêche au brochet où il faut du matériel solide. Avec l’hameçon simple, point de faiblesse comme chez les tandems par exemple.

Une construction en tandem est celle qui rapporte la faveur des adeptes de la traîne. Les deux hameçons augmentent les chances d’un bon ferrage, chose quelquefois compliquée à cause de la grande longueur de ligne à l’eau. Les tandems ne peuvent cependant être utilisés que pour ce type de pêche car les deux hameçons s’entremêleraient lors de lancers conventionnels. Ils sont aussi plus lourds qu’un hameçon simple. Le principe du tandem est d’utiliser deux petits hameçons plutôt qu’un gros, ils sont donc tout indiqués pour la pêche aux salmonidés. Le fil qui relie les deux parties peut être de nylon conventionnel mais il est plus courant de trouver un petit câble d’acier recouvert de plastique. Ce deuxième système est préférable au premier car le monofilament est porté à se courber avec le temps, et fera que l’hameçon arrière sera désaxé par rapport au premier, provoquant ainsi une rotation du streamer ou une orientation qui ne sera plus naturelle et qui inhibera l’attaque du poisson.

Un autre grand avantage de la construction en tandem est que rien ne limite la longueur du streamer. Il est donc possible de fabriquer des leurres surdimensionnés, chose impossible avec les hameçons conventionnels.

Il existe d’infinies possibilités quant au choix des agencements d’hameçons pour monter les tandems. L’hameçon de tête est presque toujours attaché de la même façon, c’est-à-dire droit, la pointe en bas. La position de l’hameçon de queue elle, est très variable et pas nécessairement identique au premier. Il n’y a pas de règle stricte pour le montage et chaque fabricant y va selon ses propres convictions. Vous devrez donc acheter ce que vous pourrez trouver. Mais si vous avez le choix, essayez de respecter certaines règles de base simples. Pour les salmonidés, utilisez de petits hameçons de no 8 à no 4 ou no 2. Le doré devrait être bien retenu avec des hameçons un peu plus gros sans toute fois dépasser le numéro 1/0. Les achigans seront bien accrochés avec les mêmes dimensions que celles utilisées pour les dorés et les brochets tandis que ceux qui mettront vos tandems en charpie seront mieux servis avec des hameçons simples numéro 2/0.

Vous trouverez donc une panoplie d’agencements d’hameçons chez les streamers en tandem qui sauront sûrement vous inspirer dans votre choix. L’hameçon de queue pourra être inversé, double, triple ou encore plus petit, plus gros ou identique de forme ou de position au premier. Tous les principes sont bons à un moment ou à un autre. C’est une question de choix personnel.

                   

À la pêche à la traîne, il est important que votre mouche soit plus visible, plus volumineuse qu’en temps normal afin d’être repérée de plus loin par les poissons. Un streamer à hampe longue et un autre monté en tandem. Ils ont la même grosseur et possèdent chacun des qualités différentes. L’hameçon simple ne pourra jamais s’emmêler tandis que le tandem assure un meilleur ferrage en raison des deux hameçons qu’il comporte. La variété des tandems est multiple. Selon vos préférences, vous pouvez choisir d’employer un tandem dont l’hameçon arrière sera double ou triple, tourné vers le haut ou vers le bas. 

Il est une autre forme de construction de streamer pour la pêche à la traîne, il s’agit de mouches montées sur des hameçons à hampe très longue. Quelques compagnies en fabriquent et je les ai souvent utilisés avec satisfaction. Ils ont l’avantage de ne jamais s’entremêler ni sous l’eau ni dans les boîtes à mouches et sont aussi plus faciles à utiliser pour l’artisan qui veut monter de gros streamers. Ils n’offrent cependant pas la qualité de ferrage des deux hameçons du tandem. Autre défaut occasionnel, la longueur de la hampe leur confère une certaine faiblesse et lors d’un combat avec un poisson de forte taille comme un maskinongé ou un gros brochet, il pourrait y avoir une rupture. Chez certaines compagnies, cependant, le diamètre de cette hampe a été surdimensionné afin de contrer le problème. Ce procédé efficace amène un surplus de poids, certes mais qui ne saurait ennuyer le pêcheur à la traîne. Même qu’en y pensant bien, ce surplus de poids peut, à l’occasion être suffisant alors qu’un hameçon conventionnel devrait être plombé.

Ces streamers seront fort appréciés des pêcheurs de gros carnassiers mais sont plutôt difficiles à trouver sur le marché.

Les streamers construits pour la pêche à la traîne auraient avantage à être lestés. Les mouches, de par leur confection, étant légères, vous ne pécherez qu’en surface si vous n’ajoutez pas un certain poids quelque part. Même les soies calantes extra rapides n’offrent pas toujours une descente suffisamment rapide. Si par exemple, vous péchez la ouananiche qui exige une vitesse plutôt rapide et qui se complaît dans les eaux froides et donc souvent profondes, vous aurez de la difficulté à atteindre ces deux objectifs, rapidité et profondeur, avec une simple soie calante, et le streamer lesté vous y aidera. Pour plomber un streamer, rien ne vaut les hameçons à hampe extra longue. Vous y trouverez toute la place qu’il vous faut pour attacher le fil de plomb et vous pourrez en mettre tant que vous voudrez.

La confection de streamers pour la pêche à la traîne n’est pas différente des autres mis à part la conception en tandem. Les hackles doivent être larges et denses, tout le contraire de ceux qui servent à la construction de mouches sèches. Cette conformité des plumes qui forment les ailes donnera à vos streamers la silhouette dodue d’un mené appétissant plutôt que d’un appât maigrichon. Pour parvenir à une visibilité maximale, les autres matériaux doivent être choisis pour leur brillance et pour cette raison, j’opte pour les poils d’ours polaire à chaque fois que des poils sont nécessaires. Ces poil sont plus dispendieux et difficiles à trouver que les poils de chevreuil, mais leur brillance est incomparable.

Un détail sur lequel il faut porter une attention particulière lors de la confection est le lien entre les deux hameçons d’un tandem. À mes débuts comme monteur, j’enroulais du fil sur toute la longueur de la hampe des hameçons, puis je fabriquais des bosses sur ces mêmes hampes à l’aide de fil aggloméré afin que le petit câble d’acier ait beaucoup de difficulté à glisser le long de la hampe. Enfin, une fois les deux hameçons solidement reliés par plusieurs dizaines de tours de fil, je fixais le tout à jamais avec de la colle époxy. Ces streamers sont aujourd’hui en très piteux état après toutes ces années, mais les deux hameçons sont toujours reliés ensembles (voir illustration 1). Il n’est cependant pas nécessaire d’en faire autant. Si le fil d’acier est fixé sur toute la longueur des hampes et si toute sa surface est recouverte de fil enroulé et bien serré, lors d’une très forte tension, l’hameçon se dépliera avant que le fil d’acier ne glisse. Les vieux streamers qui ont été rangés humides sont cependant à surveiller, le fil de montage aurait pu pourrir avec le temps.

Les modèles

Règle générale, les modèles connus qui ont fait leurs preuves sont ceux qui devraient avoir la faveur des pêcheurs à la traîne. Cependant, l’originalité n’est pas à écarter du revers de la main et libre à vous si vous voulez laisser aller votre imagination.

De tous les modèles existants, ceux qui imitent des menés sont ceux qui sont les plus populaires auprès des pêcheurs de salmonidés. L’irréductible Gray Ghost ou encore les fameux Muddler Minnow, Black Nose Dace, Little Brook Trout ou Hornberg en sont les représentants les plus connus. Les pêcheurs de dorés et d’achigans y trouveront aussi leur compte mais en ajoutant à leur collection quelques streamers colorés comme le Juneau spécial tout orange ou encore le bien connu Mickey Finn. Les amateurs de brochets auront eux aussi quelques Mickey Finn dans leur boîte à mouche mais en version gros modèle à hameçon simple en plus de quelques exemplaires de Coho Killer, un streamer malheureusement peu connu fait d’un corps de mylar argent, d’une sous-aile de poils blancs et d’une aile de poils orange fluorescent.


Personnellement, j’utilise des bucktails pour la pêche au brochet. Ils sont faits de poils de queue de chevreuil très solides et ils sont les plus résistants aux nombreuses dents de ces voraces poissons que les traditionnels streamers en plumes. Le Mickey Finn est de loin mon préféré mais à l’occasion, pour tenter un poisson que j’ai manqué par exemple, j’utilise un Coho Killer qui ne déçoit que rarement. Le brochet étant ce qu’il est, il n’est pas nécessaire ici d’utiliser les rares et dispendieux poils d’ours polaire.

Quoiqu’il en soit, le facteur principal pour qu’un modèle de streamer soit efficace est toujours le même, «Si vous avez une con-fiance inébranlable dans votre choix de mouche, il sera bon».

Pour prouver la véracité de cette phrase, j’ai vécu, un certain printemps une situation digne de mention. J’avais, l’hiver précédent, fabriqué toute une série de streamers pour salmonidés. Des modèles par dizaines gonflaient mes boîtes à mouches. La glace partie, c’est avec un enthousiasme frisant l’exaltation que mes copains et moi avons, ce matin-là, mis les canots à l’eau. Après avoir distribué plusieurs de mes dernières créations et les conseils qui allaient avec, je me suis mis à la tâche en péchant à la traîne près de la surface. À midi, limite légale atteinte, je me suis dirigé vers le rendez-vous pour le lunch. Surprise, tous avaient leur limite et aucun n’avait utilisé le même modèle de mouche! Il y a des jours comme ça… Mais il n’en est pas toujours ainsi. J’ai déjà vécu une autre belle journée mais très différente. Le seul pêcheur cette fois, à avoir réussi quelques prises et je dirais même plusieurs prises, était aussi le seul à posséder un Grey Ghost. Pour les autres, rien, pas même une touche! C’est ça, la pêche.

Donc, si vous ne voulez pas manquer le bateau, équipez-vous tout d’abord de quelques modèles connus qui ont fait leurs preuves et pensez ensuite à un peu d’exotisme pour compléter votre choix de couleurs.

J’ai une référence à vous suggérer si vous voulez pousser un peu plus loin vos connaissances sur les mouches pour la pêche à la traîne, il s’agit de « Trolling flies for trout and salmon» par Dick Stewart et Bob Leeman. Ce livre donne des trucs de pêche, des conseils de montage pour les streamers tandem, plusieurs modèles de mouches (60 pages dont 31 avec planches couleur) et quelques notes d’histoire intéressantes.

La Pêche

II ne faut pas penser que si vous n’avez pas d’équipement pour la pêche à la mouche, vous ne pouvez pas pêcher avec une mouche. N’importe quel équipement peut servir à la pêche à la traîne. Le tout est de s’arranger pour que le streamer patrouille à une certaine profondeur où vous estimez qu’évoluent les poissons. Certains compteront sur la ligne plombée pour faire descendre la mouche, d’autres ajouteront du lest au monofilament de leur lancer léger ou lourd et certains pêcheurs utiliseront tout simplement leur soie préférée qu’ils laisseront traîner de la même façon que les autres précédemment cités.

Il ne faut cependant pas conclure que la pêche au streamer à la traîne est en tout point semblable à la pêche avec un poisson-nageur ou une cuillère. Il y a une différence monumentale qui fera votre bredouille si vous l’ignorez. Tous les leurres artificiels autres que la mouche ont un système qui leur donne de l’action lorsque le pêcheur lui imprime une traction lors de la traîne. Le poisson-nageur oscillera de gauche à droite, la cuillère ondulera ou tournera et les queues de plastique bougeront dans tous les sens selon leur forme. Les streamers eux, auront une course statique et seul un mouvement imprégné par le pêcheur pourra leur procurer une apparence de vie. Il ne faut jamais oublier ce point et le pêcheur devra même opter pour une routine de mouvements saccadés qu’il fera à la longue, sans même s’en rendre compte. Si certains pêcheurs ont plus de succès que leurs compagnons, c’est en grande partie à cause des mouvements qu’ils imprègnent continuellement à la canne ou à la soie pour inciter le poisson à fondre sur la mouche. Les mouvements, surtout erratiques, attirent et provoquent donc l’attaque des poissons.

Un autre truc à employer est d’utiliser une grosse cuillère ondulante comme attracteur et un streamer comme leurre au bout d’un avançon de 18 à 24 pouces. L’action de la cuillère devrait donner un mouvement suffisant à la mouche pour qu’elle ait plus de vie.

Une cuillère suivie d’une mouche est aussi valable que de mettre un appât vivant tel un ver de terre.

Dans un autre ordre d’idées, j’ai développé un jour un truc qui fonctionne plutôt bien. Un autre pêcheur dans son embarcation provoquait sans cesse ma frustration avec de régulières captures alors que, dans mon canot, le calme complet régnait. Si j’avais été seul sur le lac, j’aurais conclu tout simplement à une mauvaise journée, mais l’autre là-bas dans sa chaloupe me prouvait sans cesse le contraire. Même si j’étais loin de lui, j’ai pu voir à son éclat qu’il uti-lisait une grosse cuillère argentée, suivie d’assez loin d’un simple ver de terre. Quel était donc ce principe qui fonctionnait si bien? Simplement un appât précédé d’un attracteur! Dans toute la panoplie de mouches que j’avais avec moi, je trouverais bien l’équivalent de ces deux choses-là. À force de recherches, d’hésitations et d’imagination, j’ai fini par opter pour un gros Mickey Finn no 2 à hampe extra longue que j’avais fabriqué pour les saumons de la Moï’sie, une mouche qui mesurait bien une quinzaine de centimètres (six pouces) de long. Ce serait mon attracteur qui serait suivi de soixante centimètres (vingt-quatre pouces) de monofilament au bout duquel un muddler no 8 servirait d’appât. C’est ainsi que j’ai pu sauver ma journée de pêche cette fois-là mais je n’ai pas jeté l’idée tout de suite après et j’utilise encore ce système à l’occasion.

Un ami, fidèle pêcheur à la mouche, taquinait le brochet qui ne se montrait pas spécialement coopératif. Il lui vint alors une idée de génie, celle de présenter aux brochets un petit poisson qui courait après un bourdon qui tentait de s’échapper. Le scénario n’était pas bête et faisait appel au même instinct qui fait qu’un chien sautera sur le plat du chat même s’il n’a pas faim, simplement pour que l’autre ne l’ait pas. Une belle imitation de bourdon bien dodu fut donc attachée à une trentaine de centimètres (12 pouces) en avant d’un streamer qui imitait un petit mené et le tout fut balancé à la flotte.

Quelques minutes plus tard, le pêcheur ramenait un brochet pris par…le bourdon! Le système avait fonctionné, ce qui prouve une fois de plus que l’imagination a sa place et qu’il ne faut pas avoir peur d’essayer lorsque les méthodes conventionnelles ne donnent pas de résultats.

 

Dans ce même ordre d’idée, on peut attacher divers duos à son bas de ligne, tel un streamer précédé d’une nymphe, laissant croire ainsi aux poissons recherchés qu’un petit prédateur tente de capturer sa proie. L’action attire l’action. Les poissons intéressés par pareille présentation s’attaqueront peut-être au streamer mais l’utilisation d’une mouche d’une tout autre catégorie comme une nymphe les tentera possiblement davantage si elle s’inscrit dans leur menu.


La pêche avec un streamer tandem présente toutefois un inconvénient si vous voulez remettre les poissons à leau. Souvent accrochées par les deux hameçons, il sera à l’occasion impossible de décrocher vos captures sans les blesser. Alors si vous voulez pêcher avec des streamers très longs et pratiquer la remise à l’eau, coupez avec un outil approprié le premier hameçon du tandem ou alors optez pour les hampes extra longues.

 

 
L’équipement (quelques trucs!)

Si vous pêchez avec un équipement conçu pour la pêche à la mouche, c’est la densité de la soie qui fera caler votre streamer. Il n’y a pas de secret là-dedans mais il faut penser un peu plus loin. Le bas de ligne utilisé avec une soie calante ne devrait pas excéder 1,5 mètre (3,3 pieds) sinon vous y perdrez en profondeur. En effet, plus le bas de ligne sera long et plus le leurre qui y est attaché sera porté à remonter à cause bien sûr de la vitesse. Le streamer non lesté aura donc avantage à être attaché assez près de la soie.

Vous voulez pêcher avec deux streamers? Le meilleur nœud que je connaisse pour attacher une deuxième mouche à un bas de ligne est le nœud de l’anguille double. Il s’agit du même nœud qui est recommandé pour relier deux monofilaments de diamètre semblable, mais au lieu de couper les deux bouts, il faut en laisser un qui devrait avoir une dizaine de centimètres (quatre pouces) de longueur et à l’aide duquel vous attacherez votre deuxième mouche (voir illustration 2).

Avec un équipement de pêche à la mouche, un accessoire qui revêt une importance primordiale plus que tout autre est la ligne de réserve que doit absolument contenir votre moulinet. Le calcul est simple à faire, si vous laissez traîner 30 mètres (100 pieds) de soie, ce qui représente en passant ma distance préférée, il ne vous en restera plus que quelques mètres. Selon le modèle de soie que vous utilisez dans votre moulinet, 50 mètres (165 pieds) de ligne de réserve supplémentaire ne seront pas de trop mais seront aussi amplement suffisants.

La canne que je recommande est à action rigide pour assurer un bon ferrage. La distance qui sépare le pêcheur du poisson est l’ennemi no 1 du pêcheur et les poissons échappés à ce genre de pêche le sont majoritairement pendant les premières secondes du combat, donc à cause d’un mauvais ferrage. Le ferrage avec une trentaine de mètres (100 pieds ) de ligne qui traîne derrière l’embarcation sollicite tellement la canne qu’un modèle ultraléger pourrait se briser. Donc, évitez ces modèles et optez plutôt pour une canne plus rigide même si elle est moins agréable à manier.

En conclusion, je crois fermement que les streamers ont leur place comme leurre pour la pêche à la traîne au même titre que les poissons-nageurs et qu’un leurre métallique ou de plastique. Ils peuvent être utilisés avec n’importe quel type d’équipement, à n’importe quel moment de la saison et pour n’importe quelle espèce. Ils ont l’avantage d’être légers et faciles à ranger en plus d’être disponibles dans une diversité de couleurs que même les leurres souples de silicone ne sont capables d’approcher. Si vous ne les avez jamais essayés, donnez-leur une chance et vous verrez bien!